Bain [Libre]

« Baignade Interdite »

C’était ce que le panneau de bois près de la chute indiquait. Pourquoi donc? Candice l’ignorait mais comme elle avait toujours fait à sa tête sans respecter les règles, la jeune femme avait pris le panneau pour une patère et y avait accroché ses vêtements. Elle avait bien besoin de se laver. Après tout, le pH de l’eau naturelle était presque égale à 7 donc aucun danger pour le niveau de toxicité sur sa peau. Et puisque la chute était interdite à tous les baigneurs, elle ne risquait pas de se faire déranger.

Candice sentait les pierres du lac autour de la cascade sous ses pieds. Un massage étrange sous sa paume plantaire. Ses orteils puis ses chevilles et mollets entraient progressivement dans l’eau fraiche du plant d’eau. Le vrombissement de la chute était agréable à ses oreilles et l’adolescente se laissait bercer par le bruit de l’eau frappant les pierres du fond.

Elle s’avançait dans l’eau et des frissons commençaient à parcourir sa peau par petites vagues. Plus elle s’approchait de la chute et plus elle sentait les minuscules gouttelettes d’eau se faire propulser de la chute jusqu’à sa peau pâle et frissonnante. Rendue à la base de la chute, Candice avait de l’eau jusqu’aux reins et elle passa ses mains sous la cascade pour finalement y plonger sa tête. Ses cheveux noirs étaient étalés sur son front et d’un revers de la main elle les écarta pour mieux voir.

Le soleil brillait sur la source d’eau et l’aveuglait presque. Un arc-en-ciel s’était formé à partir des particules d’eau qui bondissaient de chaque côtés de la chute et passait au-dessus de la tête de Candice.

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Week end. Raphaël, après avoir relus "les mots" de Sartre pour la vingtième fois au moins, s'empara de son chevalet, quelques fusains et des toiles vierges. Lassé de dessiner, peindre et repeindre les meublés de son appartement, il opta cette fois ci pour le cadre d'une nature sauvage. Béret sur la tête, cigarette à la bouche, il adorait endosser le déguisement du vieux peintre de campagne française. Pourtant, ni vieux, ni campagnard. Au contraire. Bien portant, le regard pétillant, heureux de s'accorder du temps pour son propre plaisir, il obligea son coffre de voiture à avaler le chevalet de bois. Parfait. Le démarreur fait un bruit claudiquant.

- Allez tu vas pas me lâcher...

Non. La petite voiture rouge démarre, toussote légèrement, puis se laisse docilement conduire jusqu'à... jusqu'où ? A vrai dire... il n'avait pas réfléchi à la question. Il connaissait Solt depuis sa toute jeune enfance, et il n'était que très peu d'endroits qu'il ne connaissait pas. La plage... non. Trop de monde, surtout le week end. Oh je vois on fait le difficile... La montagne alors ? La forêt ? Oui la forêt ! Non ?
Non. Il avait réalisé tant d'œuvre de cet endroit merveilleux, il voulait changer. Oui mais dans ce bois, il y avait une cascade. Une très jolie cascade. Le son serait agréable, la lumière à cette heure ci de l'après midi, idéale... C'était décidé. Il s'arrêta brusquement sur la chaussée, jeta son chevalet sur le dos, mit ses fusains dans la poche arrière du jean et accrocha ses toiles au chevalet. Arrivé sur les lieux après quelques minutes de marche et d'escalade entre les rochers, il parvint à voir l'endroit en question. Mais là, surprise! Son idée de venir en ces lieux avait été injustement usurpée par quelqu'un d'autre. Une femme. Long cheveux noirs, pas très grande. Un petit gabarit qui n'allait pas faire long feu ici. Car Monsieur, dessinait Seul. Mais voilà, ses vêtements glissèrent le long de son petit corps pour venir s'échouer sur une pancarte de bois. Elle ne l'avait pas vu, il était placé légèrement en retrait, un peu plus bas. Le coquin n'en perdit pas une miette. La femme venait de déposer son dernier vêtement sur la pancarte, et s'avançait à présent dans l'eau froide du petit bain. Ses jolies fesses arrondies étaient pures délices... pour l'artiste qu'il était, bien sur. Ne voulant pas jouer le voyeur déplacé plus longtemps, Raphaël gravit les derniers rochers à puissantes enjambées et se retrouva sur une surface lisse, parfaite pour y poser son matériel. Le vrombissement de la chute couvrait le bruit qu'il faisait, et la jeune femme semblait déterminée à profiter des massages de la petite chute.

Première courbe. Esquisse d'un paysage tout à fait charmant. La fumée s'échappe de sa bouche, vole par dessus la toile. Il est concentré. Un sujet, quelque chose à faire ressortir dans son dessin. Il vient de trouver : le caractère comique de la femme pure et nue, magnifique, lavée de toute bassesse et le panneau qui indique que ce qu'elle fait est interdit. Parfait. Il n'a pas vu son visage, mais peu lui importe. Il se souvient d'elle entrant dans l'eau. Cette image était sublime. Il la retranscrirait. C'est d'ailleurs ce personnage qu'il dessina en premier, alors que ses formes étaient encore fraîchement inscrites dans sa mémoire. Combien de temps la jeune femme barbottrait dans l'eau... avant de s'apperçevoir que son corps était à l'instant même utilisé comme modèle ? Il espérait qu'elle ne le verrait pas de suite, qu'il ait au moins le temps de la dessiner elle, pour pouvoir faire la suite sans elle si elle décidait de partir.

La chute avait un effet bénéfique sur le cerveau de Candice. On aurait dit que le grondement de la source lui emplissait la tête de petits nuages qui chatouillait son cerveau. L’image des nuages encastrés dans son crâne fit rire Candice joyeusement. Les longs cheveux l’adolescente cachaient ses seins ronds et fermes qui étaient recouverts de frissons. Il ne lui manquait qu’une chose pour être parfaitement bien… Une cigarette. L’idée d’emplir ses poumons de fumée toxique l’apaisait et la rendait beaucoup plus calme.

Doucement, elle entreprit de s’approcher vers le rivage près du panneau où elle avait accroché ses vêtements. Elle avait son « kitty hoody » très mignon. C’était un chandail noir et on avait cousu des fausses oreilles de chats sur le capuchon. Elle le souleva et fouilla dans la poche droite pour sortir son paquet de cigarette. Il y avait là 6 cigarettes et 2 joints de cannabis…Le choix était difficile mais la jeune femme opta pour une cigarette. Le fait de prendre de la drogue ne l’enchantait pas aujourd’hui. Surtout qu’elle n’avait pas d’argent pour payer tout ce qu’elle engloutira lorsque la faim typique à la consommation de marijuana l’envahira.

C'était encore drôle qu'elle n'avait pas vu l'homme qui la dessinait. Il était à quelques centimètres d'elle. Candice avait été si occupée avec son choix de cigarette qu'elle en avait oublié le contexte qui était présent. En l'occurence: Elle, nue, près d'une chute avec un inconnu qui l'observait. Charmant non ? Ce ne fut qu'en portant la cigarette à sa bouche et en l'allumant qu'elle leva les yeux et vit un homme. Un bel homme certe mais un HOMME!

Il était là et il était avec un chevalet. Soit il la dessinait elle ou la chute. Candice fronça les sourcils et attira l'attention de l'homme en sofflant sa fumée de cigarette dessus. Elle avait bien sur pri la peine de se couvrir un peu en enfilant à la 4ieme vitesse sa culotte qui était à ses pieds. La voix arrogante de l'adolescente prit les devants.

-Il y a longtemps que tu regardes me baiger NUE ?!

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Un quart d'heure. De quoi lui permettre de poser l'image spéculative en image réelle, sur le papier. A présent il s'attaquait au paysage. La jeune femme ne le remarqua pas tout de suite, et Raphaël dut réprimer un sourire amusé lorsqu'elle se rendit compte de sa présence. Elle avait un visage tout à fait charmant. Une adolescente. Rien qu'une adolescente ? Non. Bien plus dans son regard. De la dureté. Du savoir. Oui elle savait beaucoup de choses. Trop peut-être pour son jeune âge. Un corps de femme miniature, une femme miniature, était-elle seulement majeure ?

Elle parut surprise, et se dépêcha de couvrir l'intimité de son joli corps. Expression colérique sur son exquis minois. Qu'allait-elle faire ? Le sermonner ? Eh oui, c'est ce qu'elle fit, n'omettant pas de le provoquer en crachant la fumée de sa cigarette sur son visage. Raphaël ne cilla pas. Il leva les yeux vers elle, puis lui renvoya la pareille avec sa cigarette : volutes de fumée nauséabonde dirigé vers ses yeux amendés. Raphaël esquissa un demi sourire moqueur sur son visage à l'expression déjà narquoise. Elle avait mit en avant son outrecuidance et son agressivité. A lui de lui montrer qu'elle se fourvoyait : ses fesses étaient bien jolies, mais Raphaël était artiste avant tout. L'homme qui s'était délecté de la vue y avait trouvé un modèle et non un objet fantasmatique.

- Vous ? Non... les jolies fesses d'une adolescente juvénile présentent bien moins d'intérêt que le spectacle qui se trouve derrière vous. D'ailleurs, vous m'obstruez la vue...

Il fit un geste de sa main lui indiquant de se pousser sur le côté.

- S'il vous plait, fit-il d'un ton excessivement poli, mais lui montrant bien qu'elle le gênait dans son entreprise.

Moqueries muettes, sarcasmes subtils. Ils avaient posés le décors. Il se concentra à nouveau sur les lignes majeures de son tableau, levant son fusain verticalement vers la cascade pour prendre des mesures fictives. Il montrait par là, qu'il se désintéressait d'elle. Se sentirait-elle offusquée ou rassurée ? Certainement les deux.

L’expression sur le visage de l’homme mettait Candice en furie. Il osait arborer le même air qu’elle. Elle sentait ses dents grincer et grogna lorsqu’il lui envoya sa fumée secondaire au visage. Non mais pour qui se prenait-il ?! Elle avait vu cette chute la première non? Elle avait bien le droit de se baigner sans que quelqu’un se décide à la dessiner ! Une bouffée de cigarette lui emplit les poumons. La sensation de fumer devait la calmer mais elle tremblait de tout son être… De colère? Non... de froid! Évidemment il faisait froid. Elle sortait d’un source d’eau et la brise légère effleurait son corps dénudé.

Après un court moment de silence, elle entendit la voix masculine de son interlocuteur :

« - Vous ? Non... les jolies fesses d'une adolescente juvénile présentent bien moins d'intérêt que le spectacle qui se trouve derrière vous. D'ailleurs, vous m'obstruez la vue... »

Les jolies fesses d’une adolescente juvénile ?! Non mais pour qui il se prenait lui ?! Candice tourna la tête question d’observer son postérieur. Et puis il avait fait un signe de la main et la pria de sa tasser. Quelle arrogance! Elle le vit continuer à dessiner la chute et elle se mit totalement devant lui et se débarrassa de la cendre de sa cigarette sur son chef d’œuvre. Pas dans l’intention de le brûler bien sur. Juste pour signifier à l’artiste que Candice avait entendu ses sarcasmes muets et qu’elle en était très mécontente.

Elle avait contourné l’homme et avait observé son travail. C’était très bien.. il s’y connaissait en la matière, c’était sur. Elle souffla sur la centre qui était tombé sur une courbe et lui pointa la chute qu’il dessinait.

-Échelle parfaite… Bravo.. Monsieur s’y connaît!

Le ton de sa voix restait toujours arrogant.

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Que n'aurait-il pas donné pour revoir encore une fois l'expression éhontée de la demoiselle ? Elle était à croquer. Choquée, humiliée : elle fulminait. Elle concentra sa vaine colère sur sa cigarette qu'elle achevait à coup de grandes bouffées. Il lui répondit, et dans la plus admirable des scènes comiques : elle évalua son postérieur d'un bref coup d'oeil en arrière. Raphaël eut un sourire en coin qu'il n'esseya pas de cacher. Il se remit à dessiner, mais la jolie fleur avait visiblement autant d'orgueil que lui : elle se dressa entre l'oeuvre et l'artiste, faisant choir avec nonchalance la cendre de sa cigarette sur le tableau. Okay, tout ce qu'elle voulait, ça l'amusait, sauf ça. Il souffla d'impatience et de consternation, levant vers elle un regard noir, hautain comme il se le devait. Il élargit sa bouche en un sourire forcé puis eut l'idée de la déshabiller du regard afin de la gêner.

- Vous devriez vous rhabiller vous frissonnez..., dit-il finalement.

Pas de remarque sur son corps. La trouvait-il jolie ou moche au point de lui demander de se rhabiller ? Elle ne pouvait pas le savoir, et il s'amusait sur cette ambiguïté pour le moins désagréable. Peut-être ne s'en formaliserait-elle pas. On pouvait même le prendre pour un signe d'attention... quoi qu'il en soit, Raphaël la poussa de nouveau, sans avoir à trop forcer cette fois ci, car la demoiselle anonyme s'intéressa soudainement pour l'oeuvre, laissant l'artiste un instant de côté. Nullement perturbé par le regard presque palpable de la jeune fille, Raphaël reprit la mesure du paysage en brandissant son fusain. Plongé dans son entreprise, il fut presque surprit lorsqu'elle s'écria derrière lui, pour lui envoyer sur un ton supérieur ce qui devait être un compliment.

- Et mademoiselle croit s'y connaître..., il tourna la tête pour lui jeter un regard à mi chemin entre la séduction et la moquerie, il ne fit pas planer le silence plus longtemps, il reprit sur un ton plus sérieux, eh bien elle doit avoir de la chance : elle ne se trompe pas, monsieur est professeur d'art. Il la toisa un instant, puis fit mine d'observer son dessin d'un air peu satisfait.

- Mais pourtant, je ne sais pas si l'échelle est bien appropriée...

Il visa le postérieur de Candice sur son dessin en l'entourant de ses mains, puis élargit l'espace entre celles-ci, donnant à penser que l'échelle du joli postérieur de Candice aurait du être plus... "largement" reproduite sur le papier... Il tourna à nouveau la tête pour se délecter de sa réaction. Il ne put s'empêcher d'élargir ses lèvres en un sourire déjà amusé...

Il voulait qu’elle se rhabille. Elle fit quelques pas vers ses vêtements et prit son kitty hoody. Elle l’enfila sans monter la fermeture éclaire et couvrit ses cheveux avec la capuche qui lui donnait l’adorable allure d’être un chat avec les fausses oreilles qui se positionnaient sur sa tête. Elle se retourna puis s’arrêta. Elle venait tout juste de lui obéir! Candice fit comme si elle était allée se vêtir de son propre gré. Il ne fallait pas qu’il se mettre à croire qu’il avait une influence sur elle! L’adolescente reprit place aux côtés de l’artiste qui ne fit rien d’autre que de lui dire d’un ton agaçant :

-Et mademoiselle croit s'y connaître...

Il avait tourné la tête et l’avait regardé d’un regard impossible a classer entre charmeur et arrogant. Puis il lui avait dit qu’il était professeur d’arts. Un enseignant en plus! Elle était tombé sur le genre de personne qui la détestait! Candice n’avait malheureusement jamais été bonne élève. Toujours en train de dessiner et de rêvasser. Elle avait abandonné ses cours. Mais la jeune femme excellait dans une matière et c’était les arts. Surtout le dessin. Évidemment elle n’oserait jamais montrer une de ses œuvres à son interlocuteur. Il serait sûrement mort de rire devant l’imperfection de sa méthode. Mais Candice savait qu’elle pouvait se perfectionner. Son talent était inné mais sa technique devait être révisée. Elle savait reconnaître des vrai chef-d’œuvres par contre.

Elle fouilla dans la poche de son hoody et prit une autre cigarette qu’elle alluma. Pendant son opération, l’artiste s’était mis à douter de son échelle et avait entouré les fesses de Candice sur le dessin pour déplacer ses mains vers les originales. La jeune femme fit un bon et fronça les sourcil. Si ils avaient été dans un dessin animé, on aurait pu voir la fumée sortir des oreilles de l’adolescente.

-Vous êtes grossier Monsieur! De quel droit vous osez ?! Vous…

Candice poussa un énorme soupir de frustration et tourna les talons pour aller se replonger jusqu’aux cuisses dans la source d’eau puis éleva la voix pour qu’il l’entende bien.

-Vous pouvez vous moquer tant que vous voulez à voix basse , je ne vous entendrai plus

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» Dans un calme parfait, elle dessine. [Libre]