Tout seul sur la petite montagne artificielle, la chèvre tourne la tête vers moi. Soit ce bouc est totalement reclus, soit c'est le roi de la montagne. Difficile à dire, vu d'ici. Je passe mon chemin : les chèvres n'offrent pas un spectacle très intéressant. Remarque … je ne suis pas fan des zoos à la base. C'est cette fille qui m'a trainé ici pour un rendez-vous. Tout allait bien, je faisais semblant d'apprécier la visite, comme je le fais toujours, puis j'ai vu sa tête qui dépassait de la foule. Seigneur, s'il me voit ici, c'est fini. Il ne me lâchera plus, voudra me parler, me toucher, se tenir encore trop près de moi et peut-être même – erk – m'embrasser à nouveau ! J'ai lâché la main de ma compagne, m'éclipsant dans la foule. Maintenant je traîne, et je ne fuis non plus une personne, mais bien deux. Cette pauvre Stephanie doit m'en vouloir à mort. Pas mon problème, c'était pour ma survie.
Cela semble être la clé, ces temps-ci. Si je veux vivre, je fuis. Enfin, non pas vivre, plutôt survivre à l'indésirable. Je marmonne entre mes dents. Je n'aime pas la fuite : je ne suis pas un trouillard. Même si papa s'entête à me dire que je suis une tapette depuis l'épisode des fleurs. Je soupire, tourne ma tête vers la cage des lions. Presque plus intéressant que les chèvres.
Je viens pour me détourner un instant de ce spectacle désolant, quand j'entends un gémissement de douleur.
-Hmn ? je fais en tournant sur moi-même pour en découvrir la source.
À la manière dont cette fille presse sa main sur son front, cela doit être elle qui a gémit. Elle a du se cogner … Contre quoi ? Je ne vois rien d'autre que cet arbre. Soit on l'y a poussé, soit elle ne regardait vraiment pas où elle posait le pied. Je m'approche, prêt, comme toujours, à rendre service si mon aide est requise.
-Ça va ? Tu ne t'es pas trop fais mal ? je demande en lui touchant le bras pour qu'elle se tourne vers moi.