On ne change pas les bonnes habitudes^^ [ PV Alexis ]

Tout le monde a ses petits problèmes. J'ai les miens, cette petite dame qui partage ma cellule temporaire a l'air d'avoir aussi les siens. Je déteste ma vie. Je déteste cet endroit. Ce n'est pas la première fois que j'y viens. Toujours est-il que je préfère me trouver ici que libre dans ma chambre. Les barreaux, ici, je les voie. Chez moi, je ne les voie pas mais je sais qu'ils sont là, à la différence aussi que je ne sais pas où ils s'arrêtent, me coupent mes élans. Je pousse un profond soupire, mes bras pendant mollement en dehors de la cellule. Le policier qui m'a arrêté plaisante avec l'un de ses collègues et, pour être poli puisque je les regarde, je souris comme si je trouvais ça amusant.

J'ai peur d'en être à réaliser que ma vie est misérable. C'est toujours ce que je fais. Rire de choses que je ne trouve pas drôle pour satisfaire les autres, rire pour ne pas penser à un tas de trucs déprimants… comme si ça marchait. Nouveau soupire, changement de pieds pour soutenir mon poids.

C'est un problème que je dois affronter. Je suis pathétique, quoi qu'en disent les autres. J'ai beau avoir l'allure d'un bout en train, n'en reste pas moins que j'ai l'âme d'un fichu emo… J'ai beau ne porter que du blanc, j'ai l'impression d'être toujours plus sombre de jour en jours. C'est à cause de ce type, ce Ford. Je pourrais le parier. Je le sens. C'est à cause de lui que tout va aussi mal. Avant je m'endurais. Qu'avait-il besoin de s'incruster dans ma vie de cette façon sournoise ?

-Yeah m'sieur… J'connais les consequences de mes actes. Une caution ? No prob. L'père va s'en occuper, as always.

Ce que je ne lui ai pas dit, c'est qu'il aurait même droit à un petit supplément, ainsi que tous ses collègues pour garder secrète ma venue ici. Le paternel n'aimerait pas que sa réputation soit entachée par son merdeux de fils bâtard.

Une partie de moi n'est pas d'accord avec cette pensée. Quel droit j'ai de me traiter moi-même de merdeux et de bâtard. Suffit Al ! Il y a bien assez de lui qui te tombe dessus, laisse-toi tranquille deux minutes. T'as pas besoin d'être parfait, t'as pas besoin d'être comme lui. C'est pas tout le monde qui suit le modèle de ses parents.

Pourquoi les choses qui comptent le plus sont toujours celles qui passent en dernier ? Quand je veux bosser, il me dit que l'école c'est important, que ma carrière future l'est plus encore. Ce boulot dans cette boutique "de merde" comme il le dit si bien, c'est temporaire. Il sait que je vais retourner dans la voie qu'il m'a tracée. J'y songe des fois, pas à faire ce qu'il dit, mais à retourner à l'école. J'aimerais bien m'en aller dans les arts, dans un quelconque conservatoire d'art dramatique… Mais bien sûr il ne le permettra jamais. C'est trop fif de porter un costume et de jouer un personnage devant public.

Bon, suffit mon grand. Ressaisis-toi. Ton père ne sera pas là avant au moins une heure, si c'est pas plus. C'est qu'il est occupé le grand chef, pas le temps de s'occuper d'un pou même à cette heure où personne ne devrait penser à bosser. Je regarde l'horloge – ils ont pris ma montre – derrière les policiers, puis me retourne. Mes yeux tombent – sans le vouloir – sur le décolleté de ma compagne de prison. Je relève aussitôt les yeux, intimidée, pour remarquer qu'elle me regarde. Je me colle un large sourire sur les lèvres, un sourire un peu idiot, le sourire de quelqu'un de sympathique.

-T'as plus l'air d'une princesse than a criminal … tu trouves pas ?

Pas la tête d'un criminel ? Si elle savait à quel point c'est vrai pour ce soir. Normalement quand je me fais arrêter, c'est pour être entré – ou avoir essayer d'entrer – dans un bar. Le trois-quarts du temps le doorman me jette dehors, et je le provoque un peu histoire qu'il appelle les flics. Non. Cette fois rien de ce genre. Pas de conduite sans permis. Pas de bagarre. Pas de drogue dans les poches. Rien du tout, rien de ce que je me prends habituellement. Non. Je me suis fais arrêter parce que je trainais dans le parc d'une école primaire après minuit. Quel délit effroyable. Ils m'ont arrêté parce que j'avais l'air louche. Il ne leur est pas passé par l'esprit que j'ai simplement coupé par la cour de récré pour rentrer plus vite chez moi. Bande de crétins attardés. C'était tellement pathétique que je n'ai même pas trouvé le moyen de les insulter sur leur crétinerie. Ça aurait été comme de creuser sous la limite.

-Oh, pas grand-chose. Teen's stuff, ya know…

Pas envie de m'étendre sur les détails. Pour les rares occasions où je peux avoir l'air un peu plus dur que je ne le suis en réalité. En prison c'est toujours un bon endroit. Derrière les barreaux, l'air ennuyé, la tronche qui se tire d'elle-même… Bon d'accord, en ce moment je souris d'une manière embarrassée juste en pensant aux circonstances de mon arrestation. Je regarde la fille avec attention en m'asseyant sur l'autre banc de la cellule, face à elle. Mignonne. Pas mon type – si seulement j'avais un type – mais très jolie. Toutefois, elle n'a réellement pas l'air d'être à sa place. Probablement une petite bourgeoise qui abuse de la drogue dans ses temps libres. Bon d'accord, je n'ai pas le droit de juger, même si je fais moi aussi partie de cette même bourgeoisie.

-C'est quoi ton nom, lady ? je demande en inclinant la tête sur le côté. Moi c'est Alex.

C'est toujours bien de connaître son nom avant de la prendre pour une droguée finie. Elle n'a pas l'air de ça. Seulement peut-être les yeux rougis. Mais ça peut aussi bien être l'alcool, ou même la fatigue.